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Date de création : 24.01.2011
Dernière mise à jour :
11.04.2015
221 articles
" Je ne comprends pas ce qui se passe "
Un article de Florence Aubenas dans Le Monde 15 juin 2012
Hénin-Beaumont, ville paisible du Pas-de-Calais, symbolise le vote FN. " Il y a une drôle d'atmosphère ", regrettent certains habitants d'origine maghrébine qui se demandent pourquoi le mot " arabe " claque aujourd'hui comme un reproche
Au rond-point à la sortie de la ville, le café est déjà fermé, mais Rachida remarque des rais de lumière derrière les stores baissés, laissant deviner une salle comble, comme si une réunion se tenait à l'abri des regards. Plus tôt dans la journée, elle avait déjà aperçu deux ou trois drapeaux français, déployés sur des voitures garées devant ce joli petit lac, où les familles aiment pique-niquer, près de l'hypermarché. Pendant qu'elle roule vers chez elle, Rachida, qui préfère comme d'autres garder l'anonymat, se demande si elle n'est pas en train de se monter la tête avec des riens sans importance. Aurait-elle seulement relevé tout ça, un autre jour que celui-ci ? On est dimanche 10 juin à Hénin-Beaumont, dans le bassin minier du Pas-de-Calais, au premier tour des législatives où se présente - entre autres - Marine Le Pen, la patronne du Front national. Et Rachida trouve l'ambiance étrange, elle ne peut pas s'en empêcher, sans trop savoir pourquoi.
Le crépuscule s'étire dans un ciel de pluie. Rachida vient de rentrer dans une de ces villas blanches bordées de massifs et de pelouse au milieu du quartier résidentiel du Bord des eaux, baptisé " la banlieue huppée " d'Hénin-Beaumont par les villages miniers des alentours, tout en briques rouges, serrés le long du canal. La table est dressée avec attention, il y a son mari, ses enfants, quelques amis aussi. Tous ont des boulots solides, les hommes comme les femmes, Mohamed à la tête d'un cabinet d'assurances, Nacéra, qui est professeure ou Said, ingénieur. Les enfants font du théâtre, fréquentent les clubs de sport. La conversation est enlevée, joyeuse, un dîner classique dans une famille française, on parle de tout et de rien, de la petite coiffeuse du centre-ville aux brushings irremplaçables ou du fils de Rachida qui veut être cuisinier. Elle le rabroue gentiment : " Tu dois avoir plus d'ambition, regarde ta soeur qui veut être avocate. " La télé est allumée dans le salon, l'un ou l'autre se lève parfois pour voir où en est le score des élections. " Il y a une drôle d'atmosphère, vous ne trouvez pas ? ", demande à son tour une amie.
Farid, un autre voisin, près du lac, a mis un certain temps à réaliser que l'" Arabe " d'Hénin-Beaumont, montré du doigt pendant toute la campagne, désigné dans les tracts du FN et dont chacun commente la " dangerosité ", c'est lui aussi. Il s'est regardé dans la salle de bains, lunettes d'écaille, raie sur le côté, les rides précoces du type qui travaille tard. Il a dit à sa femme en pointant sa propre image dans le miroir : " Tu crois que je vais finir par avoir peur de ce bougnoule en face de moi ? " Ils ont ri et pensé à leur vie dont il n'y a pas grand-chose à dire et tant mieux, une vie rangée et invisible comme celle des gens à l'aise. Brusquement, ils ont eu l'impression que toute cette quiétude venait d'être balancée sur la place publique, exposée. " Je ne m'étais jamais posé de questions : je me sens français, c'est tout, dit Farid. Ou plutôt je me sentais français. "
Leurs parents venaient de la mine, comme tout le monde ici. L'école était à un bout des corons, le puits de mine à l'autre, l'hôpital au milieu. Déjà, à l'époque, " les houillères vivaient de l'immigration, mais pas tellement venue du Maghreb ", explique Jean-François Larosière, professeur à la retraite et militant syndical. " On en comptait peut-être trois ou quatre élèves par classe contre une douzaine d'enfants "polonais". " Les mines fournissaient tout, même travail, même toit, même identité. Et à la question " d'où viens-tu ? ", il n'y avait qu'une seule réponse qui vaille : annoncer le numéro de la fosse où chacun s'enfonçait au petit jour, avec sa lampe et son casque.
Au milieu des villages miniers, Hénin-Beaumont, 25 000 habitants aujourd'hui, était la belle ville du canton, trois cinémas, autant de lycées, des cafés et des dancings réputés, le plus grand Auchan d'Europe qui vient de fêter ses quarante ans. Hafid, cadre à Pôle emploi, raconte comment les copains venaient à Mobylette draguer " les plus belles filles du coin ". La nostalgie a sans doute embelli le passé, fait oublier, par exemple, que les mineurs algériens étaient désignés par des numéros, pas par leur nom. Il n'empêche. Les belles filles d'Hénin-Beaumont s'intéressaient à la couleur des chemises davantage qu'à celle des peaux, elles voulaient des gars en imprimés à fleurs avec des cheveux longs, et tout le reste était littérature. Mariage mixte, quartier mélangé, même la langue se fabriquait ensemble : Aicha, Yamina ou Souad, toutes parlent le patois ch'ti, lançant des mots polonais ou italiens dans le sabir des corons, tissé de maison en maison.
A quel moment le temps s'est-il mis à marcher à l'envers ? Quand a-t-on commencé à entendre claquer le mot " Arabe " comme un reproche, à relever qui l'était et qui ne l'était pas, autrement que pour blaguer ou pour les matchs de foot ? Il y a quelques années, Mustapha a eu le coeur brisé quand son fils lui a appris qu'une boîte de nuit, près de Béthune, lui avait refusé l'entrée. Le gamin a lancé à son père : " Votre jeunesse était plus belle que la nôtre. " Mustapha n'a rien voulu dire, ni à lui ni même à Marie-Pierre, sa femme. Mustapha fréquente la mosquée d'Hénin-Beaumont, se sent " français, complètement ". Il s'enflamme : " J'en suis fier. Je n'ai jamais connu le racisme. " Puis sa verve retombe, d'un coup. " Je ne comprends pas ce qui se passe, on est si bien ici. On est perdus. "
Aicha raconte un peu la même histoire au sujet de son garçon, qui a intégré Saint-Cyr. Au passage, elle ne peut pas s'empêcher d'en bégayer de fierté, avant de revenir à ce qui l'occupe. Donc, les camarades de promotion de son fils lui ont demandé où se trouvait son HLM. Aicha se fâche : " Une tête comme la sienne, ça déclenche des préjugés, automatiquement. " Des anecdotes comme ça, tout le monde pourrait conter la sienne. " Quand les gens désignent les étrangers, ce n'est pas de nous dont ils parlent, mais d'êtres imaginaires qu'ils aperçoivent à la télé et qui leur font peur. Les médias nous ont rendus paranos. "
A la mairie d'Hénin-Beaumont, des appels téléphoniques demandent régulièrement : " Pouvez-vous me passer madame le maire, Marine Le Pen ? " En réalité, le FN a échoué de peu aux municipales de 2008, qui ont tourné en faveur d'un socialiste (poursuivi depuis par la justice). Dans l'opinion publique, la ville est pourtant celle de Marine Le Pen. Tout habitant, quel que soit son choix politique, se voit d'ailleurs répondre la même chose dès qu'il annonce venir d'Hénin-Beaumont : " Dites donc, les Arabes ont chaud aux fesses, chez vous, non ? " Cette année, des petites phrases ont même commencé à circuler en ville, où le chômage frôle les 16 % (chiffres Insee, 2011). La famille de Mériem, qui voulait faire construire, s'est vu conseiller par une commerçante compatissante : " Dépêchez-vous, si Marine Le Pen passe, les gens comme vous n'auront plus rien du tout. " Chez les Zaouch, famille de commerçants sans histoires, les anciens ont commencé à s'effrayer. " Vous allez devoir partir ", dit le vieux père aux grands enfants. Eux rigolent. " On a les mêmes droits, on est français, dit Nassim. Ça fait mal quand même. "
C'est peu dire pourtant que Katir Ziouche a été accueilli en triomphe quand il s'est présenté en 2001 sur la liste du maire communiste d'Auby, juste à côté d'Hénin-Beaumont. Il ressemble alors à l'élu dont toute commune rêverait : 28 ans, un garçon brillant, déjà docteur en électronique, bientôt maître de conférences à l'université de Lille. Avec ça, il a gardé une modestie de rosière, affiche une éducation parfaite et une beauté d'enfant modèle, aux grands yeux bleu foncé qui plaisent aux mères autant qu'aux filles. Katir Ziouche ne boit pas d'alcool, jamais. Les premiers à lui avoir fait des remarques sont certains de ses collègues au conseil municipal. Quand il se met à parler viande hallal lors d'un débat, le petit prince devient un autre, un étranger. " Avant de faire de la politique, je ne m'étais jamais senti aussi différent, dit-il. C'est là qu'il ne faut pas se tromper, savoir prendre le tournant, s'affirmer, expliquer, mais ne pas se fâcher. " Aujourd'hui, Katir Ziouche est devenu premier adjoint d'Auby, la plus belle réussite en politique des enfants de mineurs algériens.
De son côté, le maire d'Auby, Freddy Kaczmarek, voudrait aussi raconter quelque chose. Il n'ose pas. Hésite. Se trouble. " Je ne sais pas si je peux le dire. " Il finit par se lancer : " Moi, le PC m'a traité de fou quand j'ai mis trois noms à consonance du Maghreb sur ma liste et donné le feu vert à la construction de la mosquée six mois avant les municipales. C'est vrai, parfois la politique agit comme un frein, pas comme un progrès. Elle avance moins vite que la société. "
Dans certaines villes de la région, un électeur sur trois, voire un sur deux, vote FN. Vers Arleux, une large bande rurale derrière Douai, des parents ont confié aux professeurs que leurs gamins placardaient des Hitler en poster sur les murs de leur chambre. Certains élèves, dans des établissements d'Hénin-Beaumont, revendiquent la " mode Marine Le Pen ", qui consiste essentiellement à rouler des yeux fâchés, écouter de la musique électro et graver " Bougnoules " sur les tables de classe en clamant : " Ici, on est connu mondialement pour voter FN. "
Peu à peu, la campagne a fini par tout envahir, les maisons, les esprits. Abdelnasser Sadki, cadre dans une grosse boîte de la région, s'est longtemps fait une certaine image des électeurs FN. Bizarrement, elle ressemble comme un reflet à celle que les partisans de Marine Le Pen se font des enfants de l'immigration : " Je m'attendais forcément à des gens qui ne travaillent pas, qui ont subi des violences, avec beaucoup d'enfants, détaille Abdelnasser Sadki. Des malheureux, quoi. " Il voulait en voir au moins un et a fini par y arriver, en découvrant sa pharmacienne sur la liste de Marine Le Pen. " Je me suis dit : c'est son choix. Maintenant, on se regarde comme si de rien n'était. "
Chez Rachida, dans la villa blanche du Bord des eaux, le résultat du vote vient de tomber. Marine Le Pen arrive en tête sur la circonscription, avec plus de 40 %, frôlant les 50 sur la ville même d'Hénin-Beaumont. Une invitée murmure juste : " On ne mérite pas ça ", et puis plus rien. A la télé, on change de chaîne pour mettre le match Irlande-Croatie.
Florence Aubenas
"Tout racisme est une maladie qui finit par tuer celui qui la porte. le destin de lHumanité est la confraternité, par delà toute différence morphologique, psychologique ou spirituelle" citation de J. A. LIVRAGA.... FZ fille d'immigrés, infirmièreEcrire un commentaire